Vous trouverez dans la revue Valeurs actuelles qui sort en kiosque aujourd’hui (n°3934, semaine du 19 au 25 avril 2012) ainsi que sur le site internet de Valeurs actuelles, le contenu de mon entretien avec les journalistes Fabrice Madouas et Mickaël Fonton.
Fabrice Madouas, rédacteur en chef-adjoint de Valeurs actuelles : « La droite veut réduire les flux migratoires, la gauche accorder le droit de vote aux étrangers. Deux conceptions de la nation s’affrontent dans les urnes. L’analyse de Malika Sorel-Sutter, membre du Haut Conseil à l’intégration »
Extrait :
« Faut-il fixer des quotas, comme le font certains pays ? Il faut fixer un principe de cohérence. Maîtriser les flux migratoires, cela veut dire : 1. Ne pas accepter plus d’étrangers que nous ne pouvons financièrement en accueillir. Au vu de l’état de ses finances, du niveau de sa dette, de ses faibles perspectives de croissance, il faut avoir la lucidité d’admettre que la France ne peut plus accueillir grand monde. 2. S’assurer que l’entrée de nouveaux immigrés ne va pas empêcher l’insertion de ceux déjà présents (l’insertion, c’est le simple respect des principes qui régissent le vivre-ensemble de la société d’accueil ; l’intégration, c’est un processus plus complexe, qui se joue sur le registre affectif et moral, et qui conduit, lorsqu’il réussit, à l’assimilation. On ne peut pas prétendre gouverner un pays en ignorant ce principe de cohérence.
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Une polémique a éclaté sur la viande halal. Pensez-vous qu’elle soit subsidiaire, comme le disent certains commentateurs ? Ceux qui l’affirment, y compris dans le monde politique, n’ont rien compris ou font semblant de ne rien comprendre. Le “halal” est central dans la dégradation de l’intégration culturelle des populations de l’immigration du Sud car il ne concerne pas seulement l’abattage rituel : il s’agit d’une philosophie de vie qui consiste, au travers des concepts de “pur” et d’“impur”, de “licite” et d’“illicite” à bâtir une muraille identitaire autour d’une communauté d’appartenance qui se base sur des principes religieux et non sur les principes républicains. L’islamologue Gilles Kepel – dont je partage les observations mais pas les conclusions – a montré dans un livre récent (Quatre-vingt-treize, Gallimard) que le halal était devenu un des vecteurs les plus puissants de « l’affirmation identitaire ». Il parle même de « perspective de purification » et attire l’attention sur le fait que l’enjeu du halal, au travers de ce rigorisme, est le « contrôle cultuel et politique » des musulmans par les salafistes et les Frères musulmans, qui se livrent bataille sur la terre de France considérée comme importante au vu des millions de musulmans qui y résident. La question du halal pose également celle de la dîme qui avait pourtant été abolie à la Révolution française.
L’étude de Gilles Kepel porte sur l’agglomération de Clichy-Montfermeil. Peut-on l’extrapoler à la France entière ? Tout ce que nous recueillons comme informations au Haut Conseil à l’intégration confirme les observations de Gilles Kepel.
Nous assistons à une montée en puissance de la mise en avant d’une identité religieuse. Chaque jour amène son lot de revendications nouvelles, que ce soit dans le monde universitaire, dans les entreprises, à l’hôpital, dans les lycées. Au lycée, il y a le phénomène de l’abaya (robe qui couvre l’intégralité du corps) qui se propage. Il nous a été signalé le cas d’ingénieurs qui ne souhaitaient pas être dirigés par une femme ; d’étudiants en classe préparatoire aux grandes écoles qui refusaient de passer un oral avec un professeur femme ou encore d’étudier d’autres philosophes qu’Averroès ; d’étudiantes à l’université, voilées et gantées, qui se regroupaient systématiquement au premier rang de l’amphi et interrompaient régulièrement les cours de sociologie pour ramener tous les débats aux méfaits de la colonisation ; de salariés qui imposent à leur employeur leurs prières quotidiennes. La liste est longue et émane de l’ensemble du territoire. L’explication du refus de respecter nos règles du vivre ensemble par le niveau socio-économique est une imposture qui doit être démasquée, car c’est elle qui permet la prolifération de comportements asociaux.
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Qu’attendez-vous de nos élites ? Que celles qui sont encore habitées d’un esprit de cohérence s’expriment. Qu’elles n’aient pas peur ! Et qu’elles cessent de subventionner des associations qui participent à dresser les populations de l’immigration contre les Français en propageant l’accusation de racisme. Ces associations diffusent un message dangereux. Il faudrait faire un audit du financement des associations afin que l’argent du contribuable n’aille qu’à celles qui sont véritablement engagées dans le soutien scolaire et dans la diffusion des principes républicains.
Ce qui est prioritaire en matière d’immigration-intégration, c’est, outre la maîtrise des flux migratoires, la refonte du code de la nationalité. L’octroi de la nationalité doit venir couronner la réussite du processus d’intégration ayant conduit à l’assimilation (…) »