Voici le contenu d’une dépêche publiée par l’AEF :
Dépêche n°149949
Paris, Vendredi 13 mai 2011, 12:33:19
« Quel avenir pour l’école républicaine ? » (écho d’un colloque organisé par l’Ader)
« L’autonomisation des établissements, c’est non ! Il faut résister car nous avons à faire face à un projet politique collectif : que voulons-nous pour nos enfants demain ? », avance Malika Sorel, membre du HCI, jeudi 12 mai 2011, intervenant en clôture d’un colloque organisé à Paris par l’Ader, association de défense de l’école républicaine[1], intitulé « Quel avenir pour l’école républicaine ? ». « Le problème, ce n’est pas l’école, c’est toute la société. Elle entraîne des conditions d’enseignement qui rendent presque impossible la mission de l’école », poursuit Malika Sorel. Jean-Paul Brighelli, enseignant et auteur de « La fabrique du crétin » (AEF n°60783), Sophie Coignard, journaliste et auteur du « Pacte immoral » (AEF n°144243), Dominique Reynié, professeur de sciences politiques à Sciences Po et directeur général de Fondapol, François Portzer, président de l’Ader et du Snalc-CSEN et Claire Mazeron, vice-président du syndicat ont participé à ce débat.
Pour Jean-Paul Brighelli, « l’Éducation nationale est morte, du moins moribonde ». « Le respect de la laïcité, c’est terminé. Au nom de cultures plurielles, on a cessé d’enseigner la culture. Il n’y a pas non plus d’Éducation nationale d’État avec l’autonomie des établissements. Il n’y a plus d’objectifs nationaux et bientôt, il n’y aura plus de contrôles nationaux », ajoute-t-il. « Plus personne ne s’occupe de la transmission des savoirs, l’essentiel étant que les enfants soient heureux. Pourtant, ce qui fait l’école c’est un bonheur différé, reculé à la fin des études », estime-t-il.
DIVERSIFIER LE CONTENU DES PROGRAMMES ?
De son côté, Dominique Reynié liste « plusieurs éléments qui ont modifié le rapport que l’on peut avoir avec l’école et son efficacité ». L’élément « l’école a raison » a « disparu », explique-t-il précisant qu’il s’agit du fait « que la famille soutienne et soit complice de l’école ». Il note d’autres phénomènes comme « la culture de l’écran », qui témoigne « d’un changement culturel » mais également « l’hétérogénéité radicale des classes » et la « recomposition ethno-culturelle de nos sociétés ».
Dominique Reynié invite à « l’autonomisation des établissements ». « Il s’agit d’insérer les établissements dans des univers spécifiques et de faire émerger les solutions adéquates, adaptées au cadre de l’établissement. » Il propose également de « diversifier les contenus des programmes ». « Un tiers des établissements n’en font rien car ils sont trop ambitieux. En proposant des programmes différents, ces établissements en feraient plus », estime-t-il. Et d’ajouter : « Cela suppose des filières différenciées sous le contrôle des enseignants qui feraient passer un élève d’un univers à un autre en fonction de son potentiel ». « Je mets au défi quiconque de montrer que l’on peut faire assimiler le même programme à tout le monde et notamment aux élèves en difficultés qui ne sont pas soutenus par leur famille. Bourdieu parlait de “destin d’exception”, il faut organiser des fuites permettant de reproduire les mécanismes qui ont permis à certaines personnes de réussir », conclut-il.
« RÉSISTER »
Pour Claire Mazeron, vice-présidente du Snalc-CSEN, « la situation de l’école républicaine s’est rapidement dégradée ». « Il y a un combat à mener », indique-t-elle estimant que « le socle commun qui devait être la base des connaissances est devenu le plafond ». « L’école a entériné trop de renoncement », estime-t-elle. Intervenant dans la salle, une professeur d’histoire-géographie dans un lycée parisien indique : « Moi pour l’instant je fais de la résistance aux nouveaux programmes. » « Des professeurs que je connais font de même en faisant signer aux parents des papiers les autorisant à faire une dictée par semaine, pour se couvrir en cas de poursuites judiciaires. Il faut se battre sur les contenus. Aujourd’hui, on assassine l’histoire », poursuit-elle estimant que ceux « qui éduquent les enfants aujourd’hui, ce sont ceux qui font de la résistance pédagogique ».
« L’école ne peut pas tout. Les parents ne sont plus complices de l’école. Par un processus inconscient, les élèves n’apportent plus la culture de l’école républicaine à la maison. Il faut faire comprendre à notre société que les parents doivent assumer leurs responsabilités pour que les enseignants puissent faire leur métier », estime Malika Sorel. « Les politiques font preuve d’une insoutenable légèreté de l’être et méconnaissent ce sujet. Ils ne vivent pas dans notre monde et il leur est difficile de reconnaître qu’ils ont fait une erreur », avance-t-elle. « Il faut tenir et ne pas se décourager », conclut Malika Sorel.
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